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le silence d'une étoile
16 février 2012

C'est quand même un peu triste.

Elle a eu 6 enfants et une vie si confortable et dénuée d'imprévu qu'elle a décidé très tôt de la passer dans son fauteuil, devant la télé, pour ne pas rater la messe.

Elle n'a pas dispersé son énergie en marques d'affection, parce qu'elle ne savait pas ce que c'était que l'affection, n'en demandant pas, n'en dispensant pas plus.

Elle n'a pas aimé la musique, elle n'a pas aimé la littérature, elle n'a pas aimé le bruit, la fureur, les éclats de vie dans les yeux des autres et les conversations animées où l'on s'agite dans la bienveillance moqueuse de chacun. Elle n'a pas aimé non plus la douceur, le silence, la chaleur dans la tendresse, les sourires en coin et les regards de connivence.

Elle semblait aimer le tic-tac des horloges dans des salons sombres et encombrés, les repas riches et lourds, la profusion malpropre des plantes, des objets et des médisances.

Et se plaindre. Lorsqu'en 5ème, j'eus une péricardite, à 15 jours d'intervalle et 400 km de distance, elle fut contaminée.

Qu'ai-je su d'elle? Que crut-elle savoir de moi?

Il y eut ce moment où j'échappais à la petite fille très sage mais très secrète que j'avais toujours semblé avoir été, creusant d'autant plus ce gouffre d'incompréhension et d'indifférence tout juste teintée de curiosité entre nous deux.

Et pourtant, la dernière fois, confite dans son imitation du coussin de fauteuil, vautrée dans ses replis, elle a ouvert ses yeux et fixé un regard très présent sur moi. Ce regard si clair sur moi, qu'ont eu mes deux grand-mères, quelques mois avant leur mort. Je ne sais pas ce qu'elles ont reconnu.

Une vie si longue, passée dans un fauteuil, à ne rêver de rien et à n'attendre rien. Je m'efforce éperdument vers l'opposé.

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